Des quorums coulissants pour le partenariat social

Christophe Reymond, directeur du Centre patronal, plaide pour une réforme des règles de la représentativité des partenaires sociaux pour obtenir qu’une CCT soit généralisée.

La manifestation la plus aboutie du partenariat social est représentée par les conventions collectives de travail (CCT). Ces instruments, fruits de la négociation entre associations syndicales et patronales, revêtent une portée particulière lorsque l’autorité fédérale ou cantonale les déclare de force obligatoire. La CCT acquiert alors statut légal pour toute une profession.

Cette extension du champ d’application d’une CCT fait l’objet de règles spécifiques, qui posent des conditions quant à la représentativité des parties à la convention. C’est ainsi que trois majorités doivent être réunies: celle des travailleurs au syndicat, celle des entreprises affiliées à l’organisation patronale, celle enfin des entreprises qui doivent employer la majorité de tous les travailleurs de la branche.

Alors que la pratique se montre souple s’agissant du quorum des travailleurs, la gauche et les syndicats réclament depuis longtemps une tolérance analogue pour le quorum des employeurs, parfois même sa suppression pure et simple. Or il est inimaginable d’aller si loin dès lors que l’extension d’une CCT va à l’encontre de la liberté contractuelle. On doit éviter que la réglementation des relations de travail de tout un secteur économique soit décidée par quelques apparatchiks patronaux et syndicaux ou par une association trop peu représentative. Imagine-t-on une organisation regroupant quelques géants de la branche imposer sa loi à tout le commerce de détail ?

«Il faut rechercher des moyens de faciliter l’extension des conventions collectives»

Cela ne doit pourtant pas empêcher de creuser quelques pistes qui permettraient de résoudre certaines difficultés. On constate en effet des changements structurels dans certains secteurs (atomisation des entreprises, multiplication des très petites structures) qui rendent aléatoire l’obtention de ce fameux quorum de 50% des employeurs. Est-il logique que l’on peine à étendre une CCT parce que les membres de l’association patronale représentent moins de la moitié des entreprises existantes, alors qu’elles emploient près de 90% de la branche? C’est par exemple ce que l’on a vécu dans le domaine du nettoyage, secteur où l’on ne peut que se féliciter qu’il existe finalement une convention.

La solution? En voici une: instaurer des quorums «coulissants». Si les entreprises soumises à la CCT représentent moins de 50% (par exemple 40%), elles devraient alors employer ensemble une proportion accrue des travailleurs de la branche (dans ce cas 60%). On pourrait descendre jusqu’à un quorum plancher de 35% des employeurs, pour autant que ceux-ci emploient 65% des travailleurs.

On aurait ainsi un moyen simple de faciliter la déclaration de force obligatoire d’une CCT dans certaines branches. Et un renforcement du partenariat social qui ne le dénaturerait en aucune façon.

Article du Centre patronal: